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5 avril 2020

Vacances d'hiver

Ce sont les vacances d’hiver. Enfin ! Les citadins vont pouvoir quitter pour une semaine complète leur quotidien morne fait d’embouteillages réguliers, de chauffards hautains, de pollution niée et d’une incroyable palette de gris entretenant l’euphorie des laboratoires pharmaceutiques. Dès le premier soir, tous se préparent et se jettent sur les routes pour se retrouver déjà pris dans les embouteillages des vacances quinze mètres plus loin. Mais ne nous y trompons pas : les embouteillages, les conditions de route et la grisaille goudronnée des vacances n’ont strictement rien à voir avec la vie citadine au quotidien ! Pendant les vacances, les embouteillages sont en effet beaucoup plus longs, les conditions de route beaucoup plus dangereuses et la grisaille goudronnée est omniprésente puisqu’elle se retrouve jusque dans l’architecture de nombreuses stations de ski interchangeables ! Ah ! le charme lunaire de nos stations de sports d’hiver !

Bref, après avoir multiplié leur taux d’adrénaline par dix au cours du trajet, les citadins débarquent à la montagne avec la finesse et le sens de l’observation d’un troupeau de pachydermes déboulant dans une cristallerie. Qu’importe d’ailleurs puisque ceux-ci ne sont venus que dans l’intention de rentabiliser leur séjour et surtout leur forfait exorbitant de ski alpin !

Après avoir emménagé dans une cabine formatée qui ne servira probablement que de placard et de garde-manger, les voici déjà sur les pistes, habillés en cosmonautes sortis du pire roman de S-F des années cinquante et affublés d’un sourire décérébré délicatement mis en valeur grâce à la blancheur irréelle de leurs lèvres. Si le ridicule tuait, les vacances d’hiver seraient une hécatombe, certainement bien pire que la plus terrible des canicules ! Toutefois, le citadin en vacances d’hiver possède un extraordinaire avantage : il ne pense pas ! Du coup, le ridicule – comme la notion de responsabilité – ne risque pas d’agir sur sa conscience, ce qui lui donne sur les pistes un sentiment de légèreté effroyable.

Les citadins veulent en avoir pour leur argent lorsqu’ils viennent skier. Ils passent donc l’intégralité de leurs journées sur les pistes où ils perdent les trois-quarts de leur temps dans des embouteillages inimaginables au niveau des télésièges et des téléskis. Lorsqu’ils ne se trouvent donc pas excédés par d’interminables files d’attente et par une bande d’idiots placés juste devant eux ou par quelques habitués devenus maîtres dans l’art de passer devant tout le monde, les citadins parviennent à skier de temps en temps. Compte tenu du nombre colossal de skieurs présents sur la même piste, la prudence est de mise : il faut sans cesse faire attention aux chauffards qui se prennent pour des dieux, aux jeunes skieurs récemment détenteurs de leur permis de skier ne maîtrisant pas encore complètement le code des pistes, aux excès de vitesse sévèrement punis par les patrouilles des pistes ou enregistrés par les nouveaux radars automatiques installés tout le long de la descente, aux risques de brouillard ou de verglas, aux accidents, ainsi qu’aux nombreux problèmes techniques pouvant survenir à tout instant. Et, bien entendu, ne jamais manquer sa sortie par inadvertance pour changer de piste ou redescendre vers la station puisque la marche arrière est interdite !

Bref, après une épuisante semaine passée à se ressourcer à la montagne, où les services de secours et les centres hospitaliers fonctionnent à plein régime pendant toute la saison, les citadins repartiront chez eux en se jetant une fois de plus dans les embouteillages et les conditions de route dangereuses du retour avant de retrouver les embouteillages et les conditions de vie difficiles de la ville.

Ah ! les vacances d’hiver… Quel dépaysement tout de même !

 

© 2008 L'Œil

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