Variations sur un même thème

Le système industriel et économique de ce monde est une perpétuelle fuite en avant.

Dès lors, comment éviter le gouffre vers lequel nous nous ruons aveuglément ?

Ce monde est maintenant si complexe qu’il est devenu extrêmement fragile : si la température des marchés n’est pas bonne, il tousse; si la fièvre les gagne, il tombe malade.

On connaît bien quelques vaccins contre les marchés grippés, on n’en connaît aucun contre des épidémies plus graves…

L’Homme voit son avenir comme un numéro de cirque : il n’en fait qu’à sa tête, mais rêve toujours de gloire. Vient le moment d’entrer en piste : il grimpe haut au dessus du sol, devant lui est tendue le corde du monde qu’il s’est créé. Il se saisit d’une perche : voici la société. Avide d’absolu, il s’élance, mais l’Homme n’est pas funambule de naissance…

En physique, la société humaine actuelle serait vue comme un système métastable : une bille de plomb en équilibre au sommet d’une cloche en verre.

Deux possibilités : la bille est tellement lourde que la cloche se brise sous sa masse; la bille est trop légère et le moindre souffle la fait tomber.

Le temps présent me fait imaginer l’Homme assis dans une barque au beau milieu de l’océan. Dans cette barque, il y a un trou par lequel l’eau s’infiltre. Pour ne pas couler, l’Homme doit régulièrement écoper l’eau qui inonde sa frêle embarcation. Avec le temps, il ne cesse d’améliorer la forme et d’augmenter la capacité du seau qu’il emploie pour écoper. Il consacre tout son génie à cette tâche contraignante, à ce supplice de Sisyphe, mais il ne l’utilise pas pour inventer le bouchon qui lui permettrait de combler le trou et de se retrouver à sec. L’Homme est un génie aveugle et cela l’empêche de saisir les rames qui lui permettraient enfin d’avancer. Et quand bien même il parviendrait à le faire, son aveuglement ne le guiderait pas forcément vers la terre ferme.

Il semble que je sois passé maître dans l’art de me saper moi-même le moral.

© 2008 L'Œil